Alexandre n°129757

Je laisserai évidemment à Emmanuel le loisir de faire une description plus complète de l'instrument,
mais j'avoue ne pas résister à la tentation d'ouvrir de suite un fil au sujet de cet instrument d'art.

Composition


Basse :
H. Harpe éolienne (2')

Basses et dessus :
1. Percussion ou cor anglais / Flûte ou percussion (8')
1. Cor anglais / Flûte (8')
2. Bourdon / Clarinette (16')
3. Clairon / Fifre (4')
4. Basson / Hautbois (8')


Dessus :
5. Musette (16')
VC. Voix céleste (8')
B. Baryton (32')

Forte expressif / Dolce (Métaphone) / Forte fixe
Prolongement

Le Baryton ne serait-il pas plutôt en 32' ?
De ce que montrent les photos des entrailles de la bête, la facture est étrangement proche de celle de Mustel.
Voilà un bien bel instrument.

Oui, bien sûr, 32'. Il fallait bien que je fasse une fôte !
Facture "étrangement" proche en effet. Jusqu'à la limite de la contrefaçon même...

Au sujet des "ressemblances" Mustel/Alexandre, voici ce qu'en dit Alphonse Mustel (Méthode I, p. 58), déjà cité dans le sujet "Alexandre double caisse":

Citation :

"L'essentiel et de constituer le Modèle-Type, l'étalon dirions-nous, qui doit servir de base et de formule générale, et nous le croyons défini dans le plan tracé ci-dessus [description d'un harmonium à huit jeux avec métaphone, forté-expressif, double-expression, etc.] en nous référant d'ailleurs en ceci au suffrage des grands compositeurs qui ont écrit pour lui. [...]
Ce type d'instrument n'appartient à personne en propre et tout le monde peut le réaliser. S'il fut édifié par Victor Mustel le premier, il y a beau temps que d'autres maisons se sont emparé de ce plan et ont construit d'après lui de bien beaux instruments.
Il y a des années qu'une grande maison de facture américaine s'est approprié cette disposition et qu'une non moins grande maison française s'est livrée à la construction d'instruments construits d'après ce type.
Pour l'avenir artistique aussi bien qu'industriel de l'Orgue-Expressif nous ne saurions jamais assez les en louer. D'ailleurs l'unité de plan ne saurait supprimer ni l'initiative personelle, ni l'individualité du facteur."

Ce qui m'a le plus surpris c'est le cor anglais/flûte, très "Alexandre" (normal me direz-vous), donc assez tranché; j'ai l'habitude du jeu euphonique des Mustel, beaucoup plus symphonique.
Autre particularité mécanique: le prolongement qui n'est donc pas tout à fait "prolongement-Guilmant"; il est en fait plus ingénieux car on a pas besoin d'actionner le tirant à la main: tout se fait au talon.
De plus, la voix céleste, la harpe éolienne et le baryton ne sont pas numérotés à la suite de la musette n°5, comme cela se faisait avant Mustel: VC, H, B.
Visuellement, les sommiers d'un Mustel et d'un Alexandre sont différents: Mustel fait des débouchés rectangulaires tandis que leurs angles sont arrondis chez Alexandre.

Il reste sûrement beaucoup d'autres différences à relever...

Pour ce qui concerne l'historique, cet instrument était l'harmonium du temple d'Albi qui fut construit en 1924 (le temple...), si je ne me trompe pas. Donc, après la construction de cet Alexandre (1905/10 ??? Pas de date malheureusement à l'intérieur). Comment est-il arrivé là? Un don certainement. Il a servi pour le culte jusque dans les années 90. Je me ferai repréciser tout ceci par le président de l'association qui gère le temple, qui, au passage, est un homme très sympathique, petit neveu du harpiste Macel Tournier!

Ce relevé des similitudes/différences serait fort intéressant (et possible pour vous Emmanuel).

Ayant enfin eu une heure devant moi, j'ai entrepris d'aller jusqu'à la caisse à vent. Ce n'était pas si simple car la table de laye a été vissée sur ladite caisse, à cause d'un manque d'étanchéité...
Et j'ai eu la bonne fortune de trouver une datation et une attribution: l'inévitable Eugène Chassonneau.

Transcription: Chassonneau / 1911 Paris / 1914
Retour / Chassonneau P[ère] et fils / Mars 1947 / Maison Fortin.



Accessoirement, j'ai pu comprendre pourquoi la double expression ne marchait pas dans les dessus: le plus gros ressort est cassé.

Cette découverte datée permet de dater en conséquence définitivement les deux catalogues Fortin (dits "1901") de 1911 et 1912.
Accessoirement, l'harmonium acquis par Nicolas qui est de la série 130... date de la même année 1911.

Un grand merci à Escolore et à Emmanuel pour leur travail méticuleux permettant de dater ce catalogue.