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 Procès Debain contre Alexandre en 1858

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Jean-François Baudon




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MessageSujet: Procès Debain contre Alexandre en 1858   Procès Debain contre Alexandre en 1858 EmptyVen 24 Juil 2015 - 21:27

En compilant une revue numérisée par google, je suis tombé sur le compte-rendu suivant, qui apporte un éclairage intéressant sur les relations Debain-Alexandre au début de l'aventure, et vient confirmer la tendance d'Alexandre à s'approprier les inventions des autres (procédé dont fut victime Martin de Provins, comme l'a brillament démontré Daniel Ambroise lors du 1er congrès de l'harmonium français). C'est un peu long, mais très instructif :

Revue et gazette musicale de Paris, n° 18, du 18 juillet 1858 (25e année) :

TRIBUNAL CIVIL DE LA SEINE (3e Chambre).
Présidence de M. Puissan.
Audience du 3 juillet 1858.

ORGUES-HARMONIUM. — DÉSIGNATIONS DE PRODUITS. — CESSION. — DROIT DE L'INVENTEUR. — USURPATION. — CONCURRENCE COMMERCIALE.

Debain contre Alexandre père et fils.

Celui qui a acheté le droit de se servir d'un procédé breveté ne peut s'en dire inventeur. L'usurpation du titre d'inventeur, même après que le procédé est tombé dans le domaine public, constitue un fait de concurrence déloyale, qui donne lieu à des dommages-intérêts au profit de l'inventeur véritable. Le sieur Alexandre ayant usurpé lu titre d'inventeur et fait connaître l'instru- ment en question sous le nom d'Orgue-Alexandre, il y a lieu de lui interdire cette désignation, qui est de nature à tromper le public, en faisant croire non-seulement qu'Alexandre les fabrique, mais qu'il en est l'inventeur.

Me Nicolet, avocat de Debain, expose ainsi la demande : Mon client, Messieurs, vient demander la protection de la justice contre une audacieuse usurpation commise à son préjudice par la maison Alexandre. Debain est un rare exemple de ce que peut l'intelligence unie à la persévérance du caractère. Il était, en 1831, simple ouvrier, et j'aime à rappeler cet humble commencement comme un vrai titre de noblesse. En 1848, il inventait un nouvel instrument qu'il appelait concertina.
C'était, d'une manière générale, deux accordéons accouplés, de façon à rendre possible le jeu simultané des deux mains. Si j'en crois MM. Alexandre dans leurs réclames, ce seraient déjà eux qui seraient les créateurs de cet instrument ; et ainsi ils ne daignent pas même laisser à Debain le bien dont MM. Alexandre trouvent agréable de se parer. Qu'était-ce donc alors que la maison Alexandre? Il faut bien lui rappeler des souvenirs importuns à sa grandeur actuelle. La maison Alexandre père et fils était alors tout modestement M. Alexandre Jacob, petit fabricant d'accordéons. Quoi qu'il en soit, si petit fabricant que fût M. Alexandre Jacob, il était fabricant, et c'est ainsi qu'il acquit, moyennant 1100 fr., du pauvre ouvrier Debain, le droit de prendre et d'exploiter le brevet du concertina, mais non celui de s'en proclamer l'inventeur. Il l'exploita, et il s'en trouva bien. Me Nicolet aborde les faits particuliers du procès, et explique sur quelles données repose l'instrument qui a reçu le nom d'orgue expressif. Cet instrument, inventé ou plutôt inauguré en France par Grenié vers 1810, présentait des vices capitaux qui en arrêtaient le développement. C'est M. Debain qui parvint à faire de cet instrument imparfait quelque chose d'admirable. Ainsi , il réussit à accélérer la production du son, trop lente dans l'ancien orgue. Jusque-là, l'anche baignée d'air attendait dans sa cavité qu'une soupape inférieure s'ouvrît et que l'air, s'échappant alors, vint la frapper et la mettre en vibration. Debain imagina de baigner l'anche dans un milieu d'air comprimé, et de disposer alors la soupape, non plus en dessous, mais en dessus. Après cette première conquête. Debain découvrit ou plutôt appliqua à l'orgue expressif une loi aussi élémentaire dans son principe que merveilleuse dans ses résultats; il découvrit que le caractère, le timbre du son produit par la vibration de l'anche variait suivant la forme des cases dans lesquelles l'anche était disposée , de telle sorte qu'en modifiant suivant certaines règles la forme des cavités sonores, il en modifiait le timbre, et qu'ainsi au moyen de modifications successives, on pouvait arriver à produire dans les orgues expressives les jeux du hautbois, de la clarinette, de la flûte, etc. Voilà ce qu'inventa Debain. Il prit successivement plusieurs brevets correspondants aux différentes améliorations qu'il parvint à introduire dans la fabrication de l'orgue expressif. La contrefaçon ne tarda pas à s'emparer des inventions de M. Debain. M. Debain fit saisir, et pendant l'instance qu'il soutenait contre les contrefacteurs, il apprit que la maison Alexandre, a laquelle il avait remis en dépôt quelques-uns de ses instruments, ne craignait pas de mettre à profit cette situation privilégiée pour copier à son tour les orgues qu'on lui avait confiées. M. Debain fit faire une saisie dans les magasins d'Alexandre. Celui-ci, justement effrayé des conséquences du procès dont il était menacé, se rendit le jour même chez Debain, demanda grâce et proposa un traité. Debain voulut bien l'accorder, et immédiatement intervint entre eux l'acte suivant : « Entre les soussignés,  M. Debain est propriétaire de cinq brevets d'invention, de perfectionnement et d'addition pour les orgues expressives à anches libres ; ces cinq brevets sont les seuls qui soient en ce moment sa propriété, ainsi qu'il le déclare. Par convention verbale intervenue entre les parties, M. Debain autorise MM. Alexandre père et fils à exécuter sur les procédés à lui connus jusqu'à ce jour, mentionnés dans lesdits brevets; mais il ne devra plus concéder ses droits à d'autres, à la condition expresse que MM. Alexandre ne désigneront jamais leur instrument sous le nom d'harmonium, non plus que M. Debain ne désignera le sien sous le nom de mélodium. Cette autorisation est faite à la charge par MM. Alexandre de payer à MM. Debain une somme de 10,000 francs, etc. — Paris, 4 avril 1844. » A la suite de ce traité, M. Debain donna mainlevée de la saisie pratiquée en son nom. Voilà le traité de 1844 ; n'est-il pas la reconnaissance la plus formelle du brevet qui appartient à Debain et de l'invention qu'il consacre ? Voyons maintenant comment il a été exécuté. Me Nicolet donne lecture d'un grand nombre de documents, d'annonces, de réclames émanés de la maison Alexandre, desquels il résulte que cette maison s'est attribué le mérite de l'invention et des perfectionnements dont l'usage leur a été concédé moyennant 10,000 fr. Les réclames ont porté leurs fruits ; les journaux se sont empressés de célébrer à l'envi les louanges de la maison Alexandre. Partout MM. Alexandre père et fils se sont donné ou fait donner le titre d'inventeurs. M. Debain ne s'est pas assez inquiété de cette usurpation ; il a laissé au mensonge le temps de faire son chemin, et la grande épreuve de l'Exposition universelle arrivant, il l'a trouvé plus fort que l'évidence. Le tribunal et les cours de Paris avaient déclaré que Debain était l'inventeur de l'harmonium. Le jury infirma de son autorité privée ces décisions souveraines,si bien qu'à l'Exposition le copiste a passé avant l'inventeur, Alexandre avant Debain. Le tribunal, dit Me Nicolet, fera justice de cette déplorable usurpation, si audacieuse de la part de la maison Alexandre, et si déplorable dans ses conséquences. Il ordonnera la destruction de tous les documents qui constatent cette concurrence déloyale, et défendra à Alexandre père et fils de s'intituler inventeurs de ce qu'ils n'ont pas inventé. Me Nicolet établit enfin que MM. Alexandre ont encore contrevenu aux termes du traité qui leur interdisait de se servir de la désignation d'harmonium réservée à Debain. Il donne lecture de nombreux documents qui établissent l'emploi par cette maison de cette dénomination. et il conclut à ce qu'une large réparation soit accordée à celui dont les droits ont été constamment méconnus. Me Nogent-Saint-Laurens, avocat de MM. Alexandre, soutient que M. Debain, en faisant le procès actuel, n'obéit qu'à un sentiment de jalousie envers la maison Alexandre. M. Debain a déjà perdu sa cause devant le jury de l'Exposition universelle; il veut essayer de la faire juger à nouveau par le tribunal. Ce qui prouve que le prétendu préjudice dont il parle n'est qu'un prétexte pour motiver l'instance actuelle, c'est que Debain, dans son assignation, fait remonter à douze ans le préjudice que lui cause la maison Alexandre, en s'attribuant la qualité d'inventeur. Or, jusqu'en 1855, et malgré cette prétendue concurrence commerciale, Debain vivait en bonne intelligence avec Alexandre. Il achetait des instruments dans cette maison. Cela est établi par les livres. Les relations ayant existé ainsi, on a le droit de dire que jusqu'en 1855, il n'y avait ni préjudice ni concurrence déloyale, et que cette assertion de la citation est démentie par ces relations. Me Nogent-Saint-Laurens discute le récit fait par son adversaire des faits relatifs au traité de 1844. Il est vrai qu'il y a eu saisie par Debain, mais non pas contrefaçon. La contrefaçon était articulée par Debain, niée par Alexandre : c'était un procès. Or, pour couper court à toute difficulté, la maison Alexandre, qui, dès cette époque, avait résolu de centraliser toutes les inventions et perfectionnements relatifs à son industrie, la maison Alexandre acheta le droit d'exploiter tous les brevets de Debain. Il ne faut pas croire qu'à cette époque on vint demander grâce à M. Debain. Le ton de la transaction est celui d'une transaction sur procès ; Il exclut l'idée d'une grâce. En effet, Debain vend, l'autre achète. Puis on stipule que tous les instruments d'Alexandre s'appelleront mélodium, tous ceux de Debain harmonium. L'interdiction de se servir de la désignation stipulée est réciproque entre les contractante. Enfin il est stipulé contre Debain qu'il ne pourra céder à aucuneautre personne le droit d'exploiter ses brevets. Voilà la transaction, elle n'a rien d'humiliant pour personne. Elle termine, à la satisfaction des contractants, un procès qui va commencer. Voici maintenant le perfectionnement Debain. Tout le monde sait que les orgues d'église comportent divers mécanismes que l'on nomme des registres et dont l'emploi permet d'imiter divers instruments, la flûte, le basson, le hautbois. Ces registres, Debain les a pris sur l'orgue d'église et les a appliqués à l'orgue expressif, voilà tout. On lui a acheté cela, rien de plus, rien de moins. Ceci connu, le procès peut se résumer dans deux simples questions : la maison Alexandre a-t-elle par son fait violé la convention de 4844 en se servant du mot harmonium pour désigner les instruments sortis de sa fabrique ?  A-t-elle causé un préjudice en prenant sans droit le titre d'inventeur ? Sur la première question, l'avocat soutient que nulle part, dans les annonces de la maison Alexandre, le mot harmonium n'a été employé. Cela a pu avoir lieu en Angleterre, mais ce fait est étranger à la maison Alexandre. Le mot a été employé en France une fois, mais par le Moniteur, qui, en annonçant la médaille décernée à Alexandre, s'est servi de cette désignation, sans doute parce que cette désignation est la plus fréquemment employée, qu'elle est dans le domaine public, et que son emploi ne peut causer ni préjudice, ni avantage à personne. Si la maison Alexandre a employé ensuite la désignation revendiquée par Debain, c'est lorsqu'elle reproduisait la mention du Moniteur. Sur la seconde question, il est facile de répondre à M. Debain. Il soutient que la maison Alexandre n'a rien inventé. Il y a chose jugée à cet égard. Les membres de l'Institut, les professeurs du Conservatoire ont tous reconnu et proclamé le mérite des perfectionnements réalisés par Alexandre, et en dernier ressort le jury de 1855 a tranché définitive ment la question en donnant le pas à la maison Alexandre sur la maison Debain. M. Debain, dit en terminant Me Nogent-Saint-Laurens, prétend que la maison Alexandre lui a causé un préjudice. Il ne donne à cet égard aucun document; il fait le raisonnement suivant : sans cette publicité, j'aurais eu la clientèle de la maison Alexandre. On n'établit pas un préjudice sur un raisonnement, on l'établit sur des faits; mais je soutiens que, loin de lui nuire, la publicité de la maison Alexandre lui a servi. Avant la maison Alexandre, l'orgue expressif n'était rien. Grâce à l'activité, à la supériorité, à l'intelligence de cette maison, l'industrie des orgues a reçu une impulsion considérable. Peu à peu, cet instrument a pénétré dans la mode, dans les mœurs, dans le goût général. La vente s'est multipliée, et Debain a profité, dans la mesure de son mérite, de cet immense mouvement donné à une industrie improductive et inerte, par la maison Alexandre. M. Jousselin, avocat impérial, conclut à l'admission de la demande du sieur Debain. L'organe du ministère public admet que, par la convention du 4 avril 1844, la maison Alexandre a explicitement reconnu la priorité de l'invention par Debain. En effet, lorsqu'on achète à un industriel le droit d'exploiter concurremment avec lui le brevet qu'il a pris, c'est qu'apparemment on s'incline devant sa qualité d'inventeur, c'est qu'implicitement aussi on s'engage à ne pas prendre cette qualité à sa place. MM. Alexandre, postérieurement à ce traité, ont pris eux-mêmes différents brevets. Or, leurs prétendues inventions, décrites dans ces brevets, ne sont que de petits perfectionnements, peut-être ingénieux, mais insuffisants, à coup sûr, pour leur permettre de se dire les véritables inventeurs de l'instrument. M. l'avocat impérial examine ensuite les deux griefs articulés par le demandeur, et il lui parait incontestable que la qualification d'harmonium a été fréquemment employée par Alexandre, contrairement à la lettre du traité. Quant à l'usurpation de la qualité d'inventeur, elle ne saurait sérieusement être mise en doute, Par exemple, sur les instruments mêmes de la fabrique de M. Alexandre, on peut voir inscrit le mot inventeurs. — Inventeurs de quoi ? On ne le dit pas. Est-ce d'une modification qui n'existait pas dans l'instrument, tel qu'il est sorti de la création de Debain ?  On ne le dit pas. Au bas de toutes les notices rédigées ou inspirées par la maison Alexandre, on lit en toutes lettres : Alexandre père et fils, inventeurs de l'orgue mélodium. Cette prétention se reproduit dans toutes les annonces, dans tous les articles de journaux : l'intention de l'usurpation est donc évidente. Il y a donc lieu de réprimer un fait condamnable au point de vue de la morale, et d'accorder des dommages-intérêts à Debain. Le tribunal a statué en ces termes : Attendu qu'il résulte des documents produits que l'orgue dit Alexandre, tel qu'il est aujourd'hui fabriqué et mis en vente par Alexandre père et fils, n'est autre chose, au point de vue de l'art et de l'invention, que la mise en œuvre perfectionnée de l'orgue expressif à anches libres, tel qu'il était connu depuis Grenié, tel que l'ont successivement constitué les découvertes importantes de la percussion due à Martin, de Provins, de l'application des registres due à Debain, et les améliorations de détail qui appartiennent à la maison d'Alexandre ; Attendu qu'il suit de là que ni l'une ni l'autre des parties n'a le droit  de se dire l'inventeur de l'instrument ; que chacun doit se renfermer dans la spécification de la découverte qui lui est propre et pour laquelle elle a été brevetée ; Attendu que cette situation ne peut être changée pour Alexandre par l'acquisition qu'il a faite des brevets Martin et Debain, avant qu'ils ne fussent tombés dans le domaine public, le titre et l'honneur de l'invention étant inaliénables ; et, d'ailleurs, la concession n'ayant été faite, dans l'espèce, par Debain, qu'avec la réserve du droit d'exploiter concurremment avec le cessionnaire ; Attendu qu'en vain Alexandre insiste sur l'ensemble des perfectionnements que réunit sa fabrication et sur le résultat qu'il aurait obtenu ; que le tribunal n'est pas juge de cette question, qui a été débattue devant le jury de l'Exposition; Qu'en admettant toutes les raisons d'éloges et d'encouragement qui ont été particulièrement mises en relief par le rapport du jury de 1855, en l'honneur de la maison Alexandre, il n'en demeure pas moins constant au procès, même d'après ce document, que les améliorations personnelles aux défendeurs, et qu'ils ont fait breveter, n'ont pas modifié la base et l'organisation de l'instrument, qui a toujours pour éléments constitutifs les procédés connus, avec l'application indiquée par les inventeurs ; Qu'Alexandre est donc mal fondé à revendiquer cette œuvre comme sienne et à s'en intituler l'inventeur ; En fait, Attendu qu'il résulte des documents de la cause que depuis plusieurs années Alexandre père et fils ont, dans plusieurs écrits, répandus à profusion, tant en France qu'à l'étranger, soit par eux-mêmes, soit par leurs correspondants, dont ils doivent être responsables, comme les ayant inspirés et autorisés, propagé cette opinion, aujourd'hui trop accréditée, qu'ils étaient les inventeurs de l'orgue qu'ils ont successivement mis en vente sous les noms de mélodium, d'harmonium, et enfin d'orgue- Alexandre ; Attendu que cette usurpation a été justement dénoncée par Debain comme lui portant préjudice ; qu'il est certain que le public s'adresse de préférence à celui qu'il croit être l'inventeur; que ce fait de concurrence déloyale doit être réprimé; Attendu, relativement à la désignation d'orgue-Alexandre, adoptée aujourd'hui par le défendeur pour l'annonce et la mise en vente de l'orgue expressif qu'il fabrique, que si, dans l'usage, le nom du facteur apposé sur un instrument n'a d'autre but que de faire connaître celui qui l'a exécuté, sans impliquer l'idée d'invention, cette apposition et les annonces corrélatives qui en sont la suite, ont une tout autre portée dans l'espèce, où, à raison des manœuvres successives auxquelles s'est livré Alexandre, avec une suite remarquable, il est parvenu à égarer l'opinion publique au point de faire croire à un grand nombre de personnes qu'il est réellement l'inventeur de l'orgue expressif à anches libres, avec addition des registres de l'orgue d'église ; Attendu qu'il importe, pour rectifier autant que possible l'opinion publique sur ce point, d'interdire à Alexandre de continuer à désigner les orgues sortant de sa fabrique, par ces mots : orgues-Alexandre ; Attendu, à l'égard de la dénomination d'harmonium, que si ce grief a perdu de son importance depuis le changement de désignation adopté, il n'en subsiste pas moins comme cause antérieure de dommage ; qu'il est établi par les pièces produites que, pendant plusieurs années, et récemment encore, Alexandre a annoncé et mis en vente les orgues expressives de sa fabrication sous le nom d'harmonium, dénomination que Debain s'était exclusivement réservée par son traité du 4 avril 1844, en ne permet tant a son cessionnaire du procédé que celle de mélodium; que cette infraction surtout a été commise en Angleterre ; Attendu, quant au chiffre des dommages-intérêts résultant des faits ci- dessus relevés, que la somme de 200,000 fr. réclamée par Debain est manifestement exagérée ; Qu'il n'est pas fondé à supputer les progrès de la vente de la maison Alexandre, qui, de 50,000 fr. en 1829, s'élèverait aujourd'hui à plus d'un million. Qu'en effet cette progression ne résume pas à elle seule les bénéfices de la concurrence déloyale faite à Debain ; qu'elle tient aussi à l'essor que l'activité, l'intelligence et l'habileté du fabricant, et aussi les capitaux dont dispose la maison Alexandre, ont imprimé à cette branche de l'industrie; Qu'en lui allouant une somme de 25,000 fr., la réparation du tort matériel sera suffisante ; Qu'il importe surtout de restituer à chacun sa position, et qu'il y sera pourvu par la suppression des écrits qui la faussent et par la publication du jugement qui la rétablit; Par ces motifs, Fait défense à Alexandre père et fils de s'annoncer comme étant les inventeurs de l'orgue expressif perfectionné sous quelque dénomination que ce soit; lui fait spéciale défense d'appeler orgue-Alexandre et aussi orgue-harmonium les instruments qu'il fabrique; Dit qu'en s'intitulant inventeurs et en donnant à ces instruments les dénominations ci-dessus interdites, ils ont usurpé une qualité qui ne leur appartient pas, et ont violé leurs conventions particulières avec Debain, à qui réparation est due ;Ordonne la saisie et la destruction de tout imprimé contenant les sus dites indications, notamment de la notice in-4° relevée dans les conclusions du demandeur; Condamne Alexandre père et fils, et ce par corps, à payer à Debain la somme de 25,000 fr., à titre de dommages-intérêts; Autorise, en outre, Debain à insérer aux frais des défendeurs les motifs et dispositif du présent jugement dans six journaux à son choix, tant en France qu'à l'étranger, dans quatre numéros de chacun desdits journaux, et ce dans le délai de six mois ; Fixe à deux ans la durée de la contrainte par corps ; Condamne Alexandre père et fils solidairement aux dépens, dont distraction à Bujon, avoué de Debain.
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