Bonsoir,
Nouveau venu sur le forum, je vous exprime toute ma joie de trouver un espace où, entre autres, parler de cet instrument que des esprits chagrins ont pu qualifier de pompe à cantiques.
Voilà longtemps que je côtoie les harmoniums : en 1980 (j'avais alors 13 ans), le curé de la paroisse m'a dit incidemment qu'à la tribune se trouvait un harmonium (chose indevinable pour qui n'a avait pas bravé l'escalier pentu du fond de l'église) que personne ne jouait. Pendant plusieurs jours, j'ai rêvé à cet instrument, attendant le dimanche suivant pour enfin le découvrir. Sous une épaisse étoffe rose comme le début du XX° siècle savait en produire, dormait un Alexandre et Fils de 4 jeux 1/2. J'étais émerveillé devant la profondeur du Bourdon et la puissance du Grand Jeu. Hélas à l'époque j'apprenais la guitare classique et brûlais depuis longtemps de jouer de l'orgue, mais il me fallait patienter... c'est donc en autodidacte que j'ai essayé d'appliquer les principes d'harmonie appris à l'école de musique sur les cantiques, et de déchiffrer quelques pièces faciles publiées par Louis Raffy. Que d'heures passées à la maigre lueur de l'ampoule de 40W poussiéreuse de la tribune... je crois que les résonnances de cet harmonium dans l'église m'ont plus ému que ne le pourrait maintenant un grand Cavaillé Coll. C'est en forgeant qu'on devient forgeron, et j'ai pu accompagner messes et mariages avec plus d'aisance au fil des années. Parfois, il me fallait jouer sur un instrument plus petit (un 2 jeux et même un petit harmonium d'un jeu et de 3 octaves) dans les paroisses satellites de ce coin du sud Seine et Marnais : le retour sur l'Alexandre et Fils, avec sa soufflerie impeccable, sa justesse, son fifre clair était alors un régal. En 1987, la paroisse fit l'acquisition d'un électronium, et l'harmonium resta muet, trop haut perché...
Ensuite, deux stages de musique liturgique qui m'ont beaucoup appris tant sur le plan organistique que cultuel...
En 1990, thésard, je pus (enfin) m'inscrire en classe d'orgue au conservatoire, avec l'appréhension d'entendre un professeur dégainer un « bon, on reprend tout à zéro » qu'aurait mérité un apprentissage en autodidacte. Mais il n'en fut rien, et je découvrais le répertoire d'orgue, avide de nouveautés... Passage à l'école diocésaine de Strasbourg, au programme intéressant et complet, avec comme instrument personnel un appareil numérique II-P.
En 2000, après un démémagement, j'ai décidé d'apprendre le clavecin (j'en exposerai les raisons plus tard...) ; je me suis donc inscrit au conservatoire, et ai acheté un clavecin en kit chez Ducornet à Montreuil. Pour ceux qui imaginent qu'il s'agit d'un kit du genre Ikéa à monter en une après-midi, je me dois de les détromper. Un an et demi a été nécessaire pour monter ce modèle flammand de deux claviers et trois jeux. Et là, j'ai découvert un autre monde avec la musique ancienne, la liberté laissée par la basse chiffrée, les nécessaires légèreté et précision du jeu. Au niveau liturgique à cette époque, je devais jouer sur un calamiteux synthétiseur, un tue l'amour de la musique.
Changement de région encore, et déménagement dans une maison plus grande. Sur internet, pour une poignée d'euros, je déniche un orgue Bourgarel (deux jeux permanents sur II-P en tirasse), que j'ai remis en état « minimal » (c'est-à-dire juste sans cornements, avec un toucher égal, et une harmonisation encore perfectible), sur lequel je travaille. Quelques mois plus tard (mais il va nous parler d'harmonium ou pas ??), toujours sur internet, je vois un Dumont Leliève modèle N (doté de chanoines) en état moyen (ou du moins ce que le vendeur peut m'en dire), que j'ai acheté sans visite préalable. Cet instrument est en cours de restauration (le sommier supérieur et les résonnateurs sont achevés). Pour patienter, j'ai déniché un Debain de 6 jeux 1/2 que l'ancien propriétaire voulait transformer en bar (si si, c'est possible...) que quelques dizaines d'heures ont suffi à remettre d'aplomb (manquent l'accord des anches - le Baryton 32' est trop haut par exemple-, et la confection d'un pupitre, perdu). Je déplace parfois ce Debain dans une église du secteur paroissial... qui est largement assez puissant pour ces petites églises de campagne. Sur cet instrument, la combinaison de l'éolien à gauche (2' ondulant) et de la harpe éolienne 16' à droite (ajoutant un jeu discordé à la musette) est particulièrement plaisante. Je pourrai en parler plus longuement sur un autre sujet du forum.
Avec un ami ébéniste, nous avons découvert que dans l'une des églises de notre secteur, se trouvaient trois harmoniums, dont un deux jeux vermoulu jusqu'à la corde (non sauvable du tout), un 1 jeu 1/2 et un magnifique 2 jeux de salon, que nous avons restauré (ou plus exactement que nous terminons de restaurer). Il sera inauguré près de Sens à la fin du mois d'août si tout va bien.
Je tente de transmettre le virus à mes enfants (sur cinq, il y en a bien bien qui va s'y mettre espérè-je), et j'essaie d'associer les plus grands aux travaux. A suivre...